mercredi 1 février 2006

Ruelle avec adresses

La semaine dernière, je marchais vers chez moi, pleine face en pleine lune, en empruntant le plus de ruelles possibles. Je revenais d’un petit thé avec Josée, charmante chroniqueuse qui s’intéresse au monde des blogues, cette blogosphère qui tourne souvent autour d’elle-même, voire sur elle-même. On a jasé de la vie, d’elle, de moi, des enfants, puis quelque part entre la vie et le thé, elle m’a demandé pourquoi je bloguais. Euh... Je ne savais plus. Pourtant j’ai bien dû me faire poser la question cent fois. Les raisons ne se bousculaient pas au portillon pour s'éclaircir la voix. Besoin de lectorat? Avancement de l’humanité? Exhibitionnisme? Excès de temps libre? Ce soir-là, il me semblait n’y avoir aucune bonne raison de bloguer. J’aurais dû me faire chanteur; personne ne leur demande pourquoi ils chantent. Ça m’aurait évité de réfléchir.

J’ai quitté Josée après quelques heures. J’avais cet étrange sentiment qu’on a après avoir échoué un test facile. Je marchais vers chez moi dans des ruelles obscures en évitant les flaques de lumière des lampadaires, pour me retrouver seul, pour avancer entre les sacs à ordures percés, pour pouvoir regarder dans les cuisines des gens. J’aime bien regarder dans la cuisine des gens.

Entre les rues Parthenais et Des Érables, il y a une ruelle qui se prend pour une rue. Au coin de Marie-Anne, une pancarte dit « ruelle Lafrance », mais un employé de la voirie y a maladroitement camouflé les lettres « lle ». J’ai déjà vérifié: cette rue est sur toutes les cartes de la ville. Mais c’est une ruelle, avec des clôtures un peu croches, des cabanons-niques à feu et des dos d’âne usés, une vraie sauf qu’ici et là, une adresse est accolée près de la porte d’un cabanon, pour faire comme si.

Le monde des blogues, c’est un peu une ruelle; le monde derrière les façades où jouent les enfants, où jonchent des déchets, où flottent comme des drapeaux les sous-vêtements et où l’on peut regarder dans les cuisines le soir venu. C’est surtout une ruelle qui se prend pour une rue, avec des plaques numériques vissées à des cabanons de tôle rouillée.

Mais je ne sais toujours pas ce que j’y fais.

8 commentaires:

  1. C'est comme quand on était ti-culs, Daniel. On fait de la bicyclette dans la ruelle, on zigzague, on vacille et parfois on tombe.
    Tout ça avant d'avoir le courage de foncer dans la vraie rue et de filer à toute allure.
    Et qu'est-ce qu'on apprend, dans la ruelle des blogues ? Rien.
    Sinon qu'on est pas tout seuls...???

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  2. En tous cas on y apprend que t'as le sens de la "vignette". Entre autres choses.

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  3. Hé ben!
    J'ai toujours cru que tu blogais par besoin d'écrire.
    Hé ben!

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  4. On sait rarement ce qu'on y fait. Comme quand on vient de débarquer dans le quartier et qu'on s'assoie près de la ruelle en attendant un miracle.

    Et après quelques mois on regarde derrière soi et on ne sait toujours pas ce qu'on venait y faire, mais on sait un peu mieux ce qu'on y a trouvé.

    Un ami... entre autres...

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  5. Pourquoi fait-elle de la radio, Josée?

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  6. Kafkadan : (je me prends le front, un pied sous la chaise) n'est-on si pas seuls que ça? (ça prend un cours de logique pour comprendre ça, et comme je n'en ai pas suivi, je ne vous serai d'aucune aide);
    Dan Gos : J'écrivais bien avant le blogue... Menfin, me semble... J'ai de la difficulté à me rappeler de ma vie avant le blogue...
    Catherine : Et l'amie est mieux que celle que j'avais trouvée chez Jean Peupu;
    Kaf et Coy : Je pourrais chanter des vignettes;
    jp : Josée (nom d'emprunt réel) écrit la vie (parfois empruntée mais toujours réelle) sur du papier (toujours «printé», et toujours elle rit d'elle).

    Bon, mon délire commence, je vais me coucher.

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  7. En regardant l'excellente émission sur les ruelles, hier soir à Télé-Québec, j'avais l'impression que ce billet avait été écrit en guise d'amuse-gueule, en attendant le plat de résistance télévisuel. Et je me suis demandé lequel, dans ces amoureux des ruelles, pouvait bien être l'auteur de ce carnet...

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  8. Moi je trouve que cette espace me permet d'être dans ces flaques sans être éclaboussée (trop) par la lumière.

    Tk.

    beau texte.

    (dans le fonds j'ignore pk je blog.)

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