lundi 26 janvier 2009

La Voisine (dernière partie)

J'ai senti le besoin de me défendre, moi qui pensais candidement être défendu.

- Je ne l'espionnait pas, je suis allée l'avertir qu'elle faisait un boucan d'enfer alors que la petite dormait.

Les policiers ont regardé la petite qui les épiait par en dessous, intriguée par ces deux monozigotos. Comment lui en vouloir…

- C'est que cette petite… a entrepris le premier clown.

- …ne semble pas dormir, a fini le second.

J'étais dans un mauvais rêve. J'allais me réveiller et rigoler de toute cette histoire. J'ai attendu quelques secondes sans que rien ne se passe. Il fallait que j'abdique: je nageais en pleine réalité.

- Bien sûr qu'elle ne dort pas, ai-je fini par ajouter. La voisine fait du bruit et vous êtes rentrés avec vos bottes et tout.

Comme des nageuses synchronisées, les deux représentants de la loi ont regardé leurs bottes et ont plissé légèrement les yeux. Visiblement, ils prenaient l'explication comme une accusation.

- Écoutez. La voisine faisait du bruit, je suis allé l'en avertir. Point à la ligne. C'est pas de l'espionnage, c'est une question de bon voisinage.

Celui qui avait l'air le plus taré des deux a levé une main énorme pour me couper la parole.

- Monsieur, quand cela arrive…

- …il faut appeler la police.

- En attendant, quelqu'un a porté plainte contre vous…

- …on doit intervenir.

Tout cela durait déjà depuis trop longtemps.

- Supposons que la fo.. la femme d'en haut ait raison, qu'allez-vous faire?

- Alors vous reconnaissez l'espionner?

Woooo, le terrain était plus glissant que je ne le pensais.

- Non! Je n'ai espionné personne. J'ai d'autres chats à fouetter que de glisser le regard entre les rideaux de la dame d'en haut.

Les policiers se sont regardés en souriant en coin. Ils s'amusaient de la situation, les bougres.

- En fait, elle nous a plutôt déclaré que vous…

- …écoutiez à votre plafond puis alliez lui répéter...

- …ce que vous aviez entendu.

Pas à dire, elle était douée, la voisine.

- De toutes manières, ont continué les longs bras de la loi,…

- …on voulait seulement vous avertir.

- Vous avez l'air de type bien…

- …nous imaginons que vous allez savoir quoi faire.

Je l'ignorais, en vérité, mais ils pouvaient être certains qu'il y aurait une suite.

- Alors, merci bien messieurs, ai-je dit en leur montrant le chemin vers la porte. Soyez assuré que j'ai bien retenu la leçon.

Sur le pas de la porte, dans un élan de camaraderie auquel je ne pouvais m'attendre, le plus affecté des deux a lancé à la blague:

- En tout cas, on peut comprendre que vous soyez tenté de l'espionner…

Le second de rire en ajoutant:

- …avec son petit déshabillé, plusieurs ne pourraient s'en empêcher!

Et ils sont partis, en se bidonnant tranquillement.

Après avoir recouché la petite, j'ai longuement valsé entre une contre-attaque ou l'abandon d'une guerre qui s'éterniserait à coup sûr.

Mais comme ma fille partait avec sa mère pour les deux prochaines semaines et que ma charge de travail au bureau n'était pas très contraignante, je me suis dit que des plaintes à répétition à la police pour grossière indécence sur mon balcon seraient une bonne idée…

8 commentaires:

  1. Moi, j'oublierais tout ça...
    Avoir affaire à une folle et à des bœufs dans la même journée, moi, je me sauverais chez mon chum à Chibougamau pour trois semaines....

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  2. Il faut bien avouer que ta voisine est un spécimen édifiant de l'humanité. Comme quoi édifiant n'est pas toujours un qualificatif positif...

    Il y a des gens qui vivent tout simplement dans une autre dimension.

    Sinon, il est où le balcon où on peut observer la grossière indécence?

    (Ah non je sais, j'ai encore tout compris de travers)

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  3. Pour alimenter la légende, pire m'est arrivé. J'ai eu droit à une voisine légendaire dont un jour je parlerai ici (ou ailleurs). Et les récits seront difficiles à croire.

    Et celle-là a sombré dans la grossière indécence plus d'une fois...

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  4. youppi, ma maison (de banlieue) vient (encore) de prendre de la valeur!

    Benoit

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  5. Comme diraient mes ancêtres....."La vengeance est douce au coeur de l'indien"!!
    Josée

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  6. Salut, moi aussi je dirais de ne jamais te venger d'une situation pareille ,pas la peine, rien a gagner dans ça. L'idée d'envoyer ta femme chez la voisine est trés bonne!! Tu sais maintenant les procèdures policières dans des cas semblables,ce qui est un +

    En plus, ce n'est plus ta voisine!

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  7. Si un cas du genre vous arrive encore,
    vous avez la possibilité de déposer une plainte croisée.

    C'est comme si vous renchérissiez en somme, les gens pensent rarement à dire « bien moi aussi je porte plainte », ils s'expliquent, argumentent et insultent les policiers mais ne disent pas le «j'aimerais aussi porter plainte ». Les flics doivent alors dument inscrire le motif de celle-ci, vous pouvez même ajouter « intimidation » (par l'usage fallacieux des forces de l'ordre)

    Pourquoi ce trouble? Parce que ainsi vous vous garantissez un enregistrement de votre version des faits.

    N'empêche, cette histoire est horrible, j'achèterais la voisine à votre place. Une bouteille de porto et une lettre larmoyante (la petite est malade, les médicaments si cher que vous n'avez pas les moyens de débourser pour un appartement dont les murs seraient en béton) pour l'attendrir, elle devrait se satisfaire de sa victoire et éprouver à l'avenir une certaine retenue.

    Dans quelques années, elle se sentira conne.

    J'ai fait la même chose avec un voisin italien avec une bouteille de Grappa, la paix, pour des années m'a couté 45$, c'est très peu à mon avis.

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  8. @Anonyme: Merci du conseil!! Bien que ce texte soit de la fiction, j'ai connu... hum... pire! Avoir su...

    Et la folle (du rez-de-chaussée celle-là) n'était pas achetable avec de l'alcool, surtout qu'elle en consommait vachement trop pour mon budget.

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