jeudi 13 mai 2010

Pour en finir avec le prix des libraires 2010

Il y a quelques jours, on a connu le titre récipiendaire du prix des libraires. Dany Laferrière et son Énigme du retour ont reçu les honneurs. Amplement mérités.

Mais depuis, plusieurs voix se sont élevées pour décrier ce choix. Chaque jour, je lis et entends des horreurs :
«on doit encourager la relève» (alors que le prix vise AUSSI à récompenser des auteurs établis);
«ce prix doit être différents des autres, ou dans le même ordre d'idées : ce choix est convenu» (bonjour l'indépendance);
«les autres livres sont bons aussi mais souffrent de compétitionner avec celui de Laferrière»;
«ce livre est déjà trop récompensé»;
«pour contester, je ne le lirai pas».
J'ai même entendu un «Mais cet auteur est-il seulement vraiment Québécois?» (sans commentaire)...

Misère.

Eh oui, le Laferrière est fort. Très fort. Excellent même. C'est triste pour les autres titres en lice, mais c'est comme ça.

«Ce livre est déjà trop récompensé. Il faut penser aux autres.»

Mais quel est donc cet argument?

C'est comme dire à un coureur olympique qu'il est trop médaillé.
«Tu sais, tu es arrivé premier à cette course de 400m. Comme tu as gagné le 100m et le 200m, on va donner la médaille d'or au 2e car il n'a pas encore reçu de médaille...»

Remettre un prix littéraire n'est pas faire de la social-démocratie. D'ailleurs, le faire serait enlever de la pertinence, de la justesse et de l'indépendance de jugement au prix littéraire en question.

Dany Laferrière et son Énigme du retour ont remporté plusieurs honneurs cette année, et ils sont tous mérités. C'est triste pour les autres bons - certains excellents, même - titres en lice, mais c'est comme ça.

Et ça n'empêche personne d'aller lire les autres auteurs dont les livres étaient de la compétition (c'est d'ailleurs un peu l'idée que Venise Landry exprime ici) . Depuis le temps que je m'occupe du prix des collégiens à mon cégep, je sais qu'il est parfois très bon de lire tous les titres en lice...

6 commentaires:

  1. Vous avez tout à fait raison. Cependant, bien qu'il y ait toujours quelques frustrés, je crois que la plupart des lecteurs approuvent ce choix.

    Accent Grave

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  2. Sans aucune préméditation le drame d'Haïti a servi Dany Laferrière. Mais, avouez que la coïncidence l'a servi.

    Au Québec on est ainsi faits: c'est tout ou rien.
    On dirait qu'on ne peut pas doser: un peu à Laferrière, un peu aux autres nouveaux auteurs. Cela n'aurait que justice littéraire.

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  3. Je ne suis pas sûre de coller complètement avec la métaphore de la course. Sur un cent mètres, il y a une seule trajectoire, un seul point d'arrivée et une seule technique : être le plus rapide.
    La littérature est l'art d'aller d'un point à un autre par un chemin encore pris par personne.
    la forme, la longueur du chemin et ce qu'on y rencontre sur le bord peuvent prendre des formes telles, que choisir toujours le même peut effectivement révéler la trouille et le conformisme plus que l'esprit de découverte.
    Tout dépend comment on considère la critique littéraire : ligne d'arrivée devant la tribune officielle ou balise pour indiquer un sentier tout neuf et plein de framboises...

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  4. Accent grave: En effet, la grande majorité des gens qui ont lu l'Énigme du retour approuvent le choix.

    Bobbi: Oui, le drame haïtien a allumé un spot de plus sur Laferrière. Cependant, le prix Medicis (pas le moindre) lui a été remis avant la catastrophe, et le prix de la personnalité de l'année a été décidé avant les événements...

    Il ne peut y avoir de justice littéraire. Sinon, ça voudrait dire qu'il y a connivence entre les jurys des différents prix, que l'un dépend de l'autre, et ça, je ne suis pas sûr qu'on le désire...

    Anita: Je te l'accorde, la métaphore est boiteuse. Même l'idée de la compétition l'est. Je voulais principalement faire allusion à la reconnaissance octroyée à la fin. Mais il faudrait que je travaille cette présentation... :)

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  5. Les concours entre œuvres d'art. Euh… Ah, ah, ah.
    C'est tellement n'importe quoi que parfois un Hemingway remporte un truc et on oublie tous les morons ineptes qui accumulent habituellement les honneurs. Ça sert surtout à avoir quelque chose à dire d'une œuvre, dans un monde où on ne sait plus lire, comprendre ou ressentir.
    — Champion de ci et récipiendaire ça, ce torchon a vendu plus dix-mille machin-trucs, ce qui est deux fois plus que…

    Vous faites bien de comparer aux olympiques. C'est en plein ça. Mais la littérature devrait-elle se comparer au 100 mètres ? Vraiment ?
    Qui écrit le plus vite, qui écrit le plus mieux, qui qu'a écrit le plus bon livre ?

    Pffft.

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  6. Félicitations pour avoir remis les pendules à l'heure.

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