mardi 30 octobre 2007

Trop plein (mais déversé sur 25 ans)

Bon, c'est la semaine des trop-pleins.
Je ne vous en ferai pas ici la liste complète, je risquerais de passer pour un joyeux misanthrope.

Tout de même, en voici un:

C'est quoi, cette nouvelle mode de tout additionner pour avoir l'air plus généreux?
Le gouvernement le fait souvent: il annonce un investissement de 5 milliards pour les routes? On lit dans les petits caractères en bas du contrat que cet investissement se fera sur 10 ans et que la première année, il ne donnera que 10 millions...
Pouet pouet pouet.

Et voilà que Guy Laliberté emboite le pas.

(ne le dites pas à personne, mais c'est le frère de Patrick Dion... vous voyez la ressemblance?)
Menfin.
Laliberté vient de créer une fondation (c'est noble!) et y investit lui-même 100 millions. Bravo! Mais si on lit attentivement la nouvelle, on apprend que ce 100 millions est versé en... 25 ans!
Ça demeure beaucoup, je le concède. Mais pourquoi on ne dit pas 4 millions par année plutôt que 100 millions (en 25 ans)?
Pour montrer nos compétences mathématiques?
Pour avoir l'air plus généreux?
À moins que ce soit pour masquer l'évasion fiscale?...

Ce serait intéressant que les banques en fassent de même avec les hypothèques (genre «je vous passe 200 000$ vous nous en remettez... euh... un instant que je calcule... 400 000$!!! Oups, j'oubliais, en 25 ans...»)

D'ailleurs, je ne vous l'ai pas dit mais le cégep a renouvelé mon contrat de prof:
1 500 000$! Ouais madame: 15 et 5 zéros, rien de moins.
Mais sur 25 ans...

jeudi 25 octobre 2007

Mon Globe terrestre

Petit, j’aimais passer ma main sur la surface de mon globe terrestre à relief. Du bout des doigts, je visitais des pays roses, jaunes et verts, je faisais le tour du monde, je rêvais en couleurs. Je cherchais la bosse la plus haute de l’Himalaya et je sentais alors tout le ridicule des petites enflures usées de mon coin de planète. Au fil des années, j’ai si souvent caressé du doigt le Tibet qu’il en a perdu sa couleur. J’avais un peu le doigt chinois.

Quand je touchais ma sphère, je me disais qu’un jour, j’irais partout. J’irais dans des pays de toutes les couleurs. J’irais là où des hommes pauvres savent survivre alors que des Occidentaux doivent se faire vacciner et s’entraîner des mois durant avant d’y faire un tour. Je voulais fouler du pied les sommets que je caressais du doigt. Je voulais voir s’il y avait vraiment un clou au Pôle Nord. Je voulais voguer sur le mot Atlantique. Je voulais constater que la planète était grande, contrairement à celle de ma bibliothèque, contrairement à celle du Petit Prince, ridicule avec ses petits volcans et sa fleur.

Ce globe terrestre m’a appris que le monde était plein de couleurs. Il m’a surtout appris que les pays sont rarement de la couleur qu’on se les représente, et que les enflures ridicules ne sont pas toujours là où on le croit.

lundi 22 octobre 2007

Attention, je vous lis....

Dans la revue L’actualité du 1er novembre 2007, un jeu de mots involontaire (mais savoureux)…

«La Commission européenne, dans son désir de standardiser les poids et mesures, a bien failli faire disparaître la traditionnelle pint de bière, pour la remplacer par le litre. Le projet a été abandonné à la suite des pressions [sic] des Anglais.» (page 124)

À la suite des pressions?

Les Anglais auraient saoulé les gens de la Commission?
Ils pourront dire que leurs pressions en ont saoulé plus d’un…
D’ailleurs, combien de fois ai-je cédé aux pressions anglaises? À moins que ce fût fût d’origines autres…

vendredi 19 octobre 2007

La vie est un long matin...

Ce matin, le café coulait lentement. Le soleil frappait la cuisine de biais et m’empêchait presque de lire le journal. Je n’aurais pas manqué grand chose : accidents cons, promesses politiques vulgaires, analyse – toujours la même depuis l’invention du hockey - de la partie d’hier, caricature plate. Même les mots croisés se faisaient faciles.
C’était un matin pute, un matin aisé, un matin doux pour peu qu’on lui prêtât attention.
Ce matin coulait lentement. Et moi aussi, avec lui.

mercredi 17 octobre 2007

Attention, j'écoute n'importe quoi...

Dans une publicité télévisée de Fisher Price présentement en ondes...
«Les enfants adorent grandir.»

N'importe quoi...
Moi j'haïssais assez ça...

lundi 15 octobre 2007

Bout de quai

- Hey, pétite, né sauté pas...
Une main se pose doucement sur mon épaule. En me tournant, je vois le visage d’un homme plus vieux que moi, profil hispanique, encerclé d’une jeune barbe grise. Un homme qui avait dû, peut-être, possiblement, menfin, avec de l’imagination, être beau. Mais l’âge, le vent, la friture et l’absence de dentier avait travaillé sa figure.
- Né sauté pas dévane el trane, pétite. Y faut pas.
- Cessez de m’appeler «pétite»...
- D’accorde. Yé t’appellérai plou pétite, pétite. Yé m’appelle Pedro. Et toué?
- Jules.
- Encantado, Joule. Écouté-moué. Yé vais té donné dou rasonnes dé né pas sauter. Viens icitte, pétite Joule.
Il m’attire doucement loin des rails du métro, son bras autour de mes épaules trop basses. Je le suis malgré ses vêtements sales, malgré sa laideur, malgré ses «pétites».
- Primero: La vie est belle. Malgré tout. Régardé-moué. Yé souis moche. Yé souis vieille.
- vieux...
- Viou, vieille, yé m’en fous, pétite. Yé souis laitte. Pourtant, yé souis heureuse! Y faut pas sauter.
- Et la deuxième raison?
- Tou n’es pas dé Montréal, si?...
Là, j’avoue, je ne comprends pas... C'estt écrit où que je viens de la Beauce?
Pedro se met à rire!
- Mais no, yé faisais oune pétite djoke, comme vous dites, pétite. La dousième raisonne, c’est qué t'as jamais pris lé métro icitte: lé métro, il arrive par l’autré côté! Rendou ici, il ne roulé presqué plous. Tou vas jouste avoir l’air ridicoule dé sauter dévanne oune traine arrêté!
J’ai déjà l’air ridicule. Je baisse les yeux et me dis que je suis un raté, au point de manquer un suicide tout simple. Il faut le faire: manquer un train sur des rails. Pedro m’attire dehors pour m’offrir une bière. Je marche dans ses pas.
On boit des scotches et de la bière pendant des heures. On se parle, on s’est tait, on se connaît. Puis, abdiquant devant l’alcool, Pedro s’endort sur le bar. Comme ça. Le visage sur le bras droit, les yeux clos sur ses rêves éthyliques, derrière sa barbe qui sort de sa peau, derrière ses rides d’homme qui a vu des beautés et des laideurs aussi grandes que les miennes, peut-être plus.
Je lui glisse dans la poche un bout de papier sur lequel j’ai écrit «Merci Pedro.» Et j’ai signé Pétite. Je sors.
Il fait nuit et des halos de brouillard flottent autour des réverbères. Mes pas sont étonnamment assurés compte tenu du houblon sur lequel je pose les pieds. À la station de métro, je retrouve le quai du côté Angrignon. Je souris en pensant à Pedro.
Ce coup-là, je vais à la bonne extrémité.

jeudi 11 octobre 2007

Suivi

Après quelques kilomètres de routes cahoteuses, de routes sans issues ou bloquées par des chantiers incommodants, la route se refit belle. Une pub automobile. Libérée, la machine s’est soudainement mise à ronronner. Surpris au début, Édouard s’y est habitué. Il a tranquillement cessé de redouter le nid de poule, le chauffard qui le coupe par la droite, l’orignal qui sort du bois. Le bonheur est d’une terrible banalité, au point où il emmerde, au point où l’on soupire presque pour les pénibles aléas du passé.

Puis un jour, il y eut ce petit claquement au démarrage, quand le moteur était froid. Rien qui ne semblait bien inquiétant, mais le bruit vint à s’intensifier, quand on pesait sur l’accélérateur surtout. Édouard s’assura de la prise des câbles, huila ce qui était pourtant huilé. Rien ne s’arrangeait. En désespoir de cause, il mit la musique de la radio un peu plus fort. Mais après quelques semaines, il ne pouvait plus faire semblant, faire le con, et il décida d’aller consulter.

Le docteur écouta, opina, lui prescrivit radiographies et prises de sang. On le rappellera, lui promit-on, mais Édouard savait bien qu’on ne rappelait jamais les sains, les épargnés, lui. Ce fut donc sans se méfier qu’il répondit au téléphone une semaine plus tard. Le docteur voulait le revoir. Pour un suivi.

C’est demain, le rendez-vous. D’ici là, quand il marche, il entend des pas derrière lui. Quelqu’un s’approche. Et il se demande bien quelle main se posera demain sur son épaule. D’ici là, il lève le son.

vendredi 5 octobre 2007

Basta

Quelqu'un de branché peut éclairer ma lanterne:

J'ouïs entre les branches de l'arbre à rumeurs que Basta (le groupe composé de J-F Lemieux et de S. Boucher, entre autres) ferait un retour sur scène cette année. Est-ce vrai? Ai-je rêvé?
Je serais prêt à bien des bassesses pour les voir...



«Après [ça] l'apocalypse...»

jeudi 4 octobre 2007

mercredi 3 octobre 2007

Souvenir

J’étais assis sur le quai, les jambes pendantes, les orteils effleurant la surface du lac. La brise sculptait des vaguelettes et à cent mètres flottait un huart. De l'autre côté, un pic bois perçait des trous, et tout proche un animal invisible faisait crisser les feuilles mortes. Un coin de paradis. Un coin où il faisait bon aller en pénitence.

Sur mon épaule, j’ai senti sa main se poser. Ses seins se sont pressés contre mon dos. Je gonflais de bonheur. Tout en regardant l’eau du lac, j’ai posé ma main sur la sienne. Je n’ai senti que la peau de mon épaule.

Mon corps avait eu un souvenir.