samedi 24 mars 2007

For service in Angliche, press 1

Au boulot, je fais partie d’une minorité linguistique (les Francophones) dans un collège où la majorité linguistique (les Anglophones) est une minorité linguistique (les Anglo-québécois) dans une majorité linguistique (les Québécois) elle-même linguistiquement minoritaire (les Canadiens-français) dans une majorité canadienne (les autrefois Anglais aujourd’hui connus sous l’appellation Quenêêdieune), tout cela marinant dans une vaste marmite one-size-fits-all que sont les Américains (les Ameuwicênz). Inutile de spécifier qu’au collège, les rapports oraux entre membres de communautés linguales différentes sont quasi schizophréniques, et il est toujours délicat d’établir le code des échanges quand on ne connaît pas son interlocuteur.

Souvent, j’essaie de pratiquer mon anglais appris en écoutant des émissions de chiffres et des trucs intellectuels, mais devant mes traductions approximatives et mot pour mot d’expressions francophones du genre «I was in the moon» et autres «Could you please move, you’re in my legs…», mon interlocuteur trouve parfois moins fastidieux de pratiquer son français. Quand j’en rencontre un qui fait des efforts gros comme un camion de pompier pour me causer en français de météo, de bouffe de cafétéria ou de problèmes sexuels, je souris, j’admire la mécanique travailler et j’oublie que je suis professeur de langues pour ne pas le décourager avec des rectificatifs de genre, d'accord ou de liaison.

Vendredi, je jasais famille avec une collègue. Son français boitait comme un bossu, mais il était tout de même meilleur que mon Angliche. Alors je laissais aller, je glissais sur les mots invariablement féminins sans m’y accrocher, je savourais l’accent, sourire au lèvres.

Puis la femme m’a dit :
« Maintenant, ma fille est grande. Maintenant, on a une petite chiotte. »

Je continuais à sourire, je continuais à hocher la tête comme un beni-oui-oui, cependant mes neurones menaçaient de griller tant ils cherchaient ce que ma collègue voulait dire. Elle avait une petite maison sale? Une toilette trop petite pour son ado? Son ado avait un problème comportemental et était devenue malpropre?

Devant mon sourire niais qui pâlissait sous l’incompréhension, elle a cru bon de valider son choix de vocabulaire avec un synonyme :
« On a…. une petite chienne…? »

Haaaa!!!

Je ne sais pas comment j’ai fait pour ne pas mourir de rire!
Toujours est-il qu’il n’avait pas le choix, le prof a dû souligner les «t» muets dans certaines finales de mots.

Aussi, j’aurais peut-être dû lui expliquer ce qu’est une chiotte, mais je trouvais trop amusante cette erreur.
Pour ce qui des sens derrière «petite chienne», ce sera pour une autre session…

8 commentaires:

  1. Utilise cette intro pour ton cours comme exemple de sujet amené. Je payerais pour voir les expressions faciales de tes élèves. En fait, je suis sûr que l'autre Daniel aussi payerait.

    Et question de te soutenir moralement pour tes traductions approximatives, voici ma plus récente:
    (À une amie, qui était pas mal bitch ce jour là): "Are you in your week or what?" (elle qui se doutait pas que j'étais francophone... Elle ne doute plus!)

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  2. Mon oncle avait eu comme ça un étudiant ontarien qui dans un élan de traduction libre lui avait écrit:

    «Les plotes dans Shakespeare sont très songées.»*

    *Pour les unilingues, plot en anglais signifie intrigue.

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  3. Cher Ami
    Le hasard des 'mots clefs' m'a fait vous rencontrer .figurez vous qu'un gugus est arrivé chez moi par : "la langue de mon mari me sert de papier cul " voila la poésie qui nous lie vous et moi , comme tous les chemins mènent a google je vous ais trouvée , j'en suis ravie malgré tout .
    Zelda

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  4. On va pas se pancake the bun pour that...

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  5. Heureusement, tu frenches bien :)

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  6. Nathalie... Ne dis pas des choses comme cela...
    Des plans pour que ma blonde file à l'anglaise...

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  7. Ca me rappelle, quand j'étais enfant, un petit garçon bilingue, en Espagne. Il m'avait demandé : "Comment te llames-tu ?". Je trouve cette question très belle et ton histoire me plaît vraiment beaucoup.

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  8. Littéralement crampée.

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