lundi 20 décembre 2004

Fin de course

Devant moi, à 50 pas, un homme marche.
Si j’arrive au coin de la rue avant lui, j’ai gagné.
Mais les règles sont claires; je ne dois pas le toucher et je ne dois pas courir. En fait je ne dois rien laisser paraître. Alors je marche rapidement. Sans le mouvement olympique du bassin, mais très rapidement quand même. Malgré le trottoir mal déneigé, malgré mes sacs d’épicerie, malgré mon genou qui me fait un peu souffrir.

L’homme marche plus vite que je ne l’aurais cru, mais je me rapproche de lui.

Si j’arrive au coin avant lui, je suis le plus grand.

Je ne suis plus qu’à quelques mètres. Je vois la buée de son souffle, la foule retient le sien. J’entends le bruit que fait son manteau à chaque mouvement de bras. Swishhh! swishhh! 10 mètres et demi, swishhh! swishhh! 9 mètres... Le coin arrive rapidement. Au moment où j’essaie de doubler l’homme, 3 femmes et une poussette, lentes comme des reptiles, arrivent en sens contraire à sa hauteur. La droite est bloquée par une boîte postale. Saletés de cols bleus, pas foutus de déblayer le trottoir sur plus d’un mètre de largeur. Il ne reste que peu d’espace pour le doubler. La dernière tortue passe. Un sac devant moi, un sac derrière, je me faufile comme un hiéroglyphe. L’homme ralentit pour lire une annonce collée sur un poteau. C’est ma chance! J’évite le contact de justesse... Deux pas... Un...
Ça y est!!!
Je suis arrivé le premier!!!
Je suis le roi!!
La foule est en liesse!!!
J’ai gagné!!!
J’ai gagné...
J’ai gagné quoi?

Quand le feu est tourné au vert, j’ai laissé passer l’homme.
Il sifflait une chanson de Noël.

Et on est là à admirer les millions de cons qui arrivent les premiers au coin des rues.

4 commentaires:

  1. Le simple fait qui sifflait une chanson de Noël excuse sa lenteur motrice.

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  2. En fait je sifflais "vive le vent"... et en fait je t'ai laissé gagner... :P

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  3. Toujours aussi plaisant de passer par ici; fait l'effet d'un baume, d'une pause. Merci.

    M.

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  4. Excellentes , ces petites prises de conscience que vous insuffle le bon vieux fretttttt québécois, cher Demetan.

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